Un document interne révèle que Cimencam, la Cimenterie du Cameroun, aurait perdu plus de 200 millions de FCFA. C’est ce qui ressort du cinquième point de la lettre de licenciement adressée à Wilfried Kingue Dibongue, ancien employé ayant occupé pendant 13 ans le poste de Operational Procurement Specialist. Cette lettre, datée du 15 mai 2025, est parvenue à notre rédaction.
Tout a commencé le 22 octobre 2024, lorsqu’une dénonciation anonyme a été transmise via la ligne d’intégrité du groupe Holcim – auquel appartient Cimencam, avec LafargeHolcim Maroc et sa maison mère LafargeHolcim Maroc Afrique (LHMA). Cette alerte faisait état de pratiques douteuses au sein de la direction Ventes et Marketing.
Le Directeur Général de Cimencam, Xavier Legrand, reconnaît une perte financière de plus de 200 millions de FCFA pour l’entreprise. Dans la lettre de licenciement, il désigne Wilfried Kingue Dibongue comme principal responsable. Toutefois, il admet que la responsabilité directe de ce dernier dans la fraude n’est pas formellement établie. Il lui est plutôt reproché une négligence dans le traitement d’un dossier important : « Votre manque de rigueur et l’absence d’obtention de validation de votre hiérarchie ont permis à des collègues de mettre en œuvre une fraude importante, occasionnant des pertes financières substantielles à la société. (…) S’il n’est pas possible d’établir formellement votre complicité, vous avez tout au moins facilité sa mise en œuvre », peut-on lire au point 5 du courrier de licenciement, intitulé Régularisation sans validation de votre hiérarchie.
Depuis l’éclatement de cette affaire, Cimencam a renforcé ses contrôles internes : des audits sont menés plus régulièrement, et les téléphones professionnels des employés sont désormais sous surveillance a-t-on appris.
Pourtant, la traçabilité des fonds détournés reste floue. Le montant global évoqué frôle désormais les 400 millions de FCFA, mais l’origine des fuites de capitaux n’est pas encore clairement établie.
Quant à Wilfried Kingue Dibongue, il conteste son licenciement. Il estime avoir été victime d’un licenciement abusif et déplore ne pas avoir reçu le rapport d’audit qui aurait permis sa défense. Il confirme par ailleurs avoir déposé, le 22 avril 2025, une plainte auprès de l’inspection du travail du Littoral à Douala pour licenciement abusif, harcèlement moral et blocage de carrière.
Après deux confrontations, Cimencam, par l’intermédiaire de ses avocats, a catégoriquement rejeté toute tentative de conciliation à l’amiable, invitant l’ancien employé à porter l’affaire devant qui il veut.
Alors que l’État camerounais détient des parts dans Cimencam, la question se pose : où est passé l’argent ? Si le montant des pertes est connu, sa destination demeure incertaine. Plus de 400 millions de FCFA manquent à l’appel.
Une affaire qui ne fait que commencer. À suivre




